Quand à Genève Michel Sapin fait le coq.
Publié le : 24 juin 2013 - Mot Clés : chômage, emploi des jeunes, ENA, Genève, Grandes écoles, Michel SapinFiers de leur coq, les Français suscitent aussi le ricanement. Ainsi les Espagnols ironisent-ils sur ce peuple arrogant qui, pour emblème, a pris un des rares animaux qui chante les pieds dans la merde. Lundi dernier, Michel Sapin, ministre français du travail s’est rendu à Genève où, à la Confédération internationale du travail, il a chanté les mérites du plan français pour l’emploi des jeunes. L’autosatisfaction du ministre français était-elle de mise ? On rappellera que la France affiche au compteur 3,26 millions de chômeurs déclarés et, surtout, qu’un jeune sur quatre de moins de 25 ans n’a pas de travail. Pire, selon Sapin, « 500 000 jeunes n’ont aucune formation ni premier emploi véritable ». Dans ces conditions, on s’interroge sur qui a bien pu composer la chanson du ministre français sur « les bons emplois durables ». Entendons-nous bien : un ministre, en France, lit les notes que lui ont cuisinées ses équipes de premiers de la classe. En regard de ce qu’ont les ministres équivalents en Grande-Bretagne ou en Allemagne, les équipes françaises sont pléthoriques. Elles sont aussi ignorantes, sans doute parce qu’elles baignent dans le même jus d’arrogance que leur patron. Au lieu d’aller faire le beau dans la grande salle des Assemblée du Palais des Nations, que hanta le majestueux Solal, le ministre Sapin aurait eu mieux à faire de regarder comment le pays d’accueil, la Suisse, traite la question du chômage des jeunes. Ici, le chômage des 15-24 ans plafonne à 3,2%. En Suisse, pas d’énarchie ni de « grandes écoles » d’ingénieurs, commerciales ou littéraires, ces petites fabriques d’arrogance provinciales. Les élites suisses ont un accent plouc, ok, mais parlent deux ou trois langues couramment (l’actuelle présidente de la Confédération helvétique en parle quatre), ont beaucoup voyagé et ont le monde pour horizon. Quand, escorté de ses premiers de la classe aussi lisses que dociles, le ministre français vient en Suisse, ses premiers de la classe devraient le briefer sur comment s’y sont pris les Suisses pour éradiquer leur chômage. La recette n’a rien à voir avec l’évasion fiscale ou la crapulerie des banques helvétiques mais à ce que les autorités cantonales en charge de la formation, les patrons et les syndicats suisses travaillent main dans la main pour concevoir des formations adaptées à l’attente des entreprises qui, elles, ont l’innovation pour unique obsession. Selon l’IMD, après les Etats-Unis la Suisse est le pays le plus innovant du monde. 75% de ses jeunes phosphorent non sur des sujets de philosophie destinés à faire d’eux des adultes responsables (30% des électeurs français, lors des présidentielles de 2012, ont voté pour des partis aux programmes déments) mais sont en apprentissage dual entre l’école et les entreprises. Là où les PME françaises se débattent avec un code du Travail de 3200 pages pour ajuster leurs effectifs compte tenu de l’effondrement des carnets de commandes et sur quoi ironise la presse économique britannique[1], les PME suisses bataillent pour trouver de la main d’oeuvre.
Bref, on ne dénoncera jamais assez la nocivité de ces premiers de la classe, dépourvus de curiosité pour les solutions qui marchent et dont l’ego surdimensionné n’est flatté qu’à condition d’innover. Qu’ils sachent que personne en France ne leur demande d’innover mais simplement de s’inspirer de ce qui marche, ailleurs. Seul Astérix peut croire qu’il existe un exceptionnalisme français prédestiné à inventer les solutions miraculeuses dont la planète, émerveillée, s’inspirera. La planète se contrefout de ce dont sont capables de germiner nos premiers de la classe. La planète est pragmatique : les seules roues carrées qui l’amusent sont dans les musées. Nos voisins, chez qui Sapin vient de chanter le génie français, en l’occurrence ses fameux « emplois d’avenir », sont aussi capables d’observer que ce peuple qui se décrète génial est totalement déprimé.
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L'édito
La ferveur des politiques pour l’apprentissage est inversement proportionnelle à la désaffection des jeunes gens concernés qui, en masse et depuis des années, s’en détournent. Comme si,... Lire l’édito
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Posté par Lucifer - Posté le 25 juin 2013 à 7 h 04 min
A quoi rime votre illustration? Votre prélat baisse la tête, Sapin relève la sienne. Sapin, lui, sait où il va et où il nous emmène: dans le mur. En effet, il est assez piquant de l’entendre faire la leçon au monde. Je m’interroge sur la sincérité de ses propos. Idiot ou cynique?
Posté par motorhead - Posté le 15 juillet 2013 à 10 h 33 min
Quand je regarde Sapin, j’ai des doutes sur sa lucidité. Il a des yeux d’ultra-myopes, sortes de lames de rasoir qui batailleraient pour repousser l’écroulement des paupières. Voit-il seulement, ou ne fait-il qu’entendre?