Pour Darde, le plagiat ne passera pas!

Publié le : 24 novembre 2012 - Mot Clés : , , , ,

L’université Paris 8 présente plusieurs traits distinctifs qui la singularisent parmi les 85 universités françaises

En premier lieu, un certain nombre de personnes se sont obstinées à la nommer Vincennes, en souvenir du bois éponyme où des algecos avaient été installés à la va-vite en 1968. Il a fallu des décennies à ces passéistes pour admettre que l’appellation ne convenait plus. Toutefois, certains ne peuvent toujours pas s’y résigner.

Ensuite, cette université est probablement l’une où la probabilité de se faire rouer de coups entre les grilles du bâtiment et le métro est la plus élevée du pays. Les vols de portables, objets de valeur ( ?) que parachèvent les tabassages au sol ne se comptent plus. Dans son rapport d’évaluation sur l’établissement, l’AERES[1] rend hommage à l’enseignement à distance qui, pour cet établissement, permet d’atténuer « les problèmes de sécurité des lieux ».

En matière de recherches, Paris 8 fait encore office de Jurassic Park pour tout ce que l’enseignement supérieur français compte encore d’archéo-marxistes. La fièvre n’épargne aucune discipline : histoire, économie, linguistique, etc. A Paris 8, l’histoire des idées s’est arrêtée le 4 mars 1953, veille de la mort de Joseph Staline. Marx, dans ses variantes maoïste, althussérienne, lambertiste, jdanovienne est vivant et, selon ses thuriféraires, tous fonctionnaires de l’Etat français, l’avenir lui appartient. Les étudiants se bousculent à des cours où il est encore question de la baisse tendancielle du taux de profit ou de la théorie de la plus-value que sucent les patrons (tous très méchants).

Dernièrement, un nouveau chapitre de l’histoire de cet établissement s’est ouvert: le plagiat. Le mal est endémique, universel. En France, la contamination a pris des dimensions inattendues, touchant jusqu’aux géants de la pensée contemporaine: Patrick Poivre d’Arvor, Attali, Minc. Avec de tels modèles, les étudiants auraient tort de se gêner. Au reste, ils ne se gênent pas, d’autant plus que les autorités universitaires ne bronchent guère. En cas de plagiat avéré, il faudra établir un lourd dossier, le défendre devant une commission mixte composée d’enseignants et d’étudiants. Il faut avoir subi une seule fois ce chemin de croix pour comprendre pourquoi les professeurs, la plupart du temps, ferment les yeux. De toutes manières, le diplôme qu’ils décernent n’a, à leurs yeux, guère de valeur. Dans son rapport, l’AERES s’interroge sur l’hyperproductivité doctorale de Paris 8, où l’on dénombre 1800 doctorants et où sont soutenues 250 thèses par an. Oui, autant fermer les yeux.

Justement fermer les yeux, c’est ce que n’a pas fait Jean-Noël Darde. Ce collègue est un teigneux qui ne s’est laissé attendrir ni par les étudiants, ni par la hiérarchie universitaire qui, par couardise, préfère généralement enterrer ce type d’affaires. Ne pas réagir face au plagiat relève de la haine de soi. Faut-il avoir en effet peu d’estime de soi-même pour accepter sans broncher qu’un étudiant (ou un confrère) vous prenne pour un con, ce qu’est le plagié dès l’instant où, informé de ce que l’autre lui a fait subir, il se tait. Un con pleutre qui plus est. C’est pour ça qu’il faut soutenir l’effort de guerre de Jean-Noël Darde. Rejoint par une poignée de collègues, il a percé l’oreiller. La pétition est en ligne  et attend les signatures. http://archeologie-copier-coller.com. Réveillé, le ministère doit maintenant réagir. Ca tombe bien, les Assises de l’enseignement supérieur battent leur plein. Allez, en avant pour une motion !



[1] Rapport avril 2009, page 5.

Vos avis et commentaires

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Posté par Cicéron - Posté le 24 novembre 2012 à 19 h 19 min

Très long combat en perspective…. Le taux très élevé de doctorants à Paris 8 indique avant tout que les profs se moquent de leurs étudiants. Je serai curieux de savoir combien, parmi ces Jean-Foutre, empochent la prime d’encadrement doctoral, ou PES ? J’ignore ce que les étudiants font de tels diplômes mais ils devraient savoir qu’ils ne valent probablement pas un clou. Du coup, pourquoi ne pas plagier! C’est autant de transpiration en moins pour un diplôme sans valeur.

Posté par Jean-Noël Darde - Posté le 24 novembre 2012 à 20 h 48 min

Cher François Garçon,
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Je me réjouis que nous partagions la même répulsion pour la passivité dont fait preuve aujourd’hui l’Université Paris 8- Saint Denis vis-à-vis de ses plagiats et de ses plagiaires.
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Il est cependant important de souligner que cette passivité n’est pas seulement celle de la direction de l’Université Paris 8, de son conseil scientifique et de son conseil d’administration.
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Il s’agit aussi de la passivité de la 71e section du Conseil National des Universités (Sciences de l’information et de la communication), de la passivité du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche – qu’il ait à sa tête Valérie Pécresse, Laurent Wauquiez ou Geneviève Fioraso…
Vous citez un rapport de l’AERES, mais vous devriez aussi citer les rapports de l’AERES qui font l’éloge sans nuance du laboratoire de Paris 8 qui détient à n’en pas douter le record de France des thèses plagiaires et du taux d’enseignants-chercheurs plagiaires.
Il est vrai que l’Agence d’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur compte parmi ses experts… quelques plagiaires et tolérants au plagiat de Paris 8, et beaucoup d’aveugles au plagiat tant les expertises de l’AERES se limitent à compter les thèses et les publications produites plutôt qu’à les évaluer.

Vous faites une erreur historique en renvoyant Paris 8-Vincennes à la tradition historique du stalinisme des années 50. Le gauchisme de Paris 8 se situait ailleurs.
Pour ma part, je n’ai aucun problème pour inscrire mon refus et mon attitude d’aujourd’hui dans la droite ligne des années rebelles que j’ai connues et que je ne renie pas, celles de la «folie créatrice» des années-Vincennes, avec ses succès, ses excès, mais rarement médiocres.
Le déclin de Paris 8 a commencé avec son transfert à Saint-Denis et a été précipité par la médiocrité sans remède de ses ultimes présidents – gestionnaires sans envergure, opportunistes mesquins à la vue courte.
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On ne peut nier que les plagiaires de Paris 8 sont aujourd’hui protégés par des universitaires plutôt marqués à gauche, mais ce sont principalement des professeurs d’éthique (sic) marqués à droite qui ont organisé pendant plus de dix ans la protection du plagiaire dans un cas célèbre qu’a connu l’Université Lille 2 (sur mon blog, lire Trop d’éthique tue l’éthique).
Citons encore le cas de cette ancienne présidente d’université plagiaire – affaire révélée sous Valérie Pécresse (qui n’a rien fait) – aujourd’hui député suppléante de l’opposition… (Lire L’écho d’Eco).
Citons enfin les derniers ministres accrochés comme tels, dans l’ordre chronologique : Gérard Longuet, Luc Chatel, Frédéric Lefebvre, Rama Yade…

Vous avez certainement comme moi le plus grands mépris pour tous les plagiats et tous les plagiaires, c’est largement suffisant pour agir de concert.

Vous affichez avec franchise votre nom sur votre blog et vous en assumez les risques ; je fais de même. La portée des paroles, celles de “Cicéron” ci-dessus, sont toujours limitées quand elles sont prononcées sous pseudo.
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Jean-Noël Darde
MCF – Université Paris 8
http://archeologie-copier-coller.com/

Posté par François Garçon - Posté le 24 novembre 2012 à 23 h 08 min

Le CNU aimantant surtout entristes, grimpions et carriéristes, le pire est toujours certain avec cette engeance. Quant à a section 71, une des trois que je connais bien (de l’extérieur), elle concentre sans doute le plus nombre de gens médiocres dans l’université française. Mais les juristes revendiqueront peut-être cette qualité pour leurs sections, et peut-être aussi les chimistes, et pourquoi pas les historiens, etc.

Posté par Dupontel - Posté le 25 novembre 2012 à 9 h 04 min

Sur le CNU, 71ème parmi d’autres, s’y retrouvent tous ceux qui s’en serviront comme marche-pied. Tout le monde le sait, tout le monde fait semblant d’y être indifférent. A ma connaissance, le CNU ne s’est jamais prononcé sur le plagiat, ses membres étant trop occupés à sabrer dans les candidats à la qualification ceux qui sont sortent des clous, et à grenouiller pour une promotion, une prime, un changement d’affectation. Et c’est ça l’université française ! Franchement, elle est dans le caniveau, mais ça n’est pas faute d’avoir tout fait pour s’y trouver.

Posté par Fauxrato - Posté le 25 novembre 2012 à 11 h 11 min

Le plagiat est universel. Où la France et les pays latins se distinguent c’est dans l’indulgence à l’égard du plagiaire. Observez la place qu’occupe un PPDA ou un Attali. Le premier plastronne sur les ondes publiques, qui font de la surenchère pour exhiber son crâne Potemkine, le deuxième s’est vu confier (entre autres) une mission intellectuelle importante par Sarko. Pourquoi les étudiants et les profs se gêneraient-ils? Le modèle d’imposture vient d’en haut. Après, c’est vrai que la bureaucratie universitaire n’aide pas à poursuivre les délinquants, notamment quand, comme le note Darde, les faussaires figurent dans les commissions d’expertise.

Posté par P. Nadelait - Posté le 27 novembre 2012 à 12 h 28 min

Aucun universitaire n’est prêt à se lancer dans cette opération d’assainissement nécessaire. Dans les sciences humaines, les thèses sont souvent bâclées, mal lues quand elles le sont par les jurys qui savent que le document ne servira pas à grand chose. Du coup, mal lus, les travaux des étudiants peuvent être le produit de plagiats éhontés. Qui s’en aperçoit?

Posté par Scientificateur - Posté le 28 novembre 2012 à 12 h 02 min

Certes le plagiat est universel et vieux comme le monde, mais les réponses données aux plagiaires sont différentes d’un pays à … la France ! Et oui, là où tous les pays du monde bottent sévèrement les fesses des plagiaires lorsqu’ils sont démaqués (quelque soit leur statut professionnel et social, étudiants, anciens étudiants, professionnels, chercheurs-chercheurs ou universitaires …), la France, elle ferme les yeux et met la poussière sous le tapis ! En complément à l’excellent article de F. Garçon, j’indique ma modeste contribution à ce débat (une réaction du mars 2009) :

http://www.strategy-of-innovation.com/article-la-valorisation-du-doctorat-passe-aussi-passe-la-sanction-69694280.html

Posté par Rigolo - Posté le 18 décembre 2012 à 16 h 56 min

Paris 8 est une université amusante. Les diplômes semblent être distribués à la louche, ce en quoi l’établissement a tort. Tout comme à Toulon, ils pourraient les vendre ce qui constituerait un petit fonds de roulement pour aménager les salles de cours. Paris 8 est l’usine des thèses de complaisance. Déjà qu’ailleurs ça n’est pas génial, là-bas c’est carrément le Grand Bazar. Les profs lisent-ils seulement ce qui passe entre leurs mains et qui, inévitablement, reçoit la mention Très Bien? Qui sont les cocus?

Posté par parabellum - Posté le 19 décembre 2012 à 14 h 38 min

Plagiat et complaisance sont les deux mamelles qui pendent sur la poitrine de nos étudiants et d’un grand nombre de gredins qu’attirent l’odeur des primes. Plus tu encadres de thèses, que tu ne lis pas ou fais semblant d’avoir lu lors de la soutenance (les gredins s’attachent le plus souvent aux notes de bas de pages, avec les remarques convenues répétées lors de chaque soutenance. Les étudiants ne peuvent s’en apercevoir, seuls le remarquent les collègues qui multiplient les soutenances avec le gredin et qui se taisent. Si tu l’ouvres, si tu dis à ton collègue qu’il est une crapule, tu ne survis pas. Fini les thésards), plus tu touches de primes. La fameuse PES, de l’ordre de 6600 euros/an. Qui dénonce cette crapulerie, aussi répugnante que le plagiat. La complaisance pour du fric ! Et nos procureurs de Depardieu qui lui font la morale. Tartuffe est bien un personnage français !!!!

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